Le coeur blanc

Catherine Poulain

Éditions de L'Olivier

  • Conseillé par
    8 mai 2020

    Un récit dérangeant dont la teneur et la forme m’ont fait passer par divers sentiments : longueur, confusion, intérêt, agacement, compassion...
    Catherine Poulain fut une de ces saisonniers dont elle nous relate l’histoire avec passion.
    « C’est la fête des saisonniers, les purs, les durs, les crados et les rebelles, français espagnols portugais, hollandais anglais ou belges…. Fils de paysans, d’ouvriers, fils de bourgeois ou fils de rien, enfants de la route ou de l’errance. »
    Histoire romancée, bien certainement, mais écrite avec son expérience et ses souvenirs.
    Il ya les saisonniers d’un été et puis les saisonniers professionnels qui reviennent d’année en année au même endroit et forment une communauté plus ou moins bien intégrée à la population.
    Il ya toutes sortes d’individus.
    Des pessimistes, des optimistes, des paumés, des étrangers……..
    Tous plus ou moins shootés ou alcooliques, se retrouvant chaque soir dans les bars pour éponger leur chaude journée de labeur.
    « Tout ça m’a traversé comme une vérité alors que je lançais un fruit difforme dans la caisse à mes pieds ? C’était moi que je jetais. C’était nous. Nous qui finirions dans des cabanons pourris, qui mourrions dans le feu de l’été ou la solitude de l’hiver, dans le travail et dans l’alcool. Ceux dont on ne veut pas dans les douches du camping, des fois qu’on contaminerait le site ou que ça fasse trop mauvais effet pour les touristes, que l’on renvoie au lavoir, crade, avec des boites de Née-Codion défoncées, les canettes vides et les bouteilles de margnat-village éclatées, c’est vrai qu’ils peuvent nous traiter de drogués et d’alcoolos les gens du village quand on voit comment y en a qui laissent le lavoir, oh je sais plus tiens, qui a tort qui a raison, et est-ce que ce n’est pas juste un malentendu - en attendant on est le rebut. »
    Il y a amitiés, des tensions, de la violence…..
    Le récit est mené par deux personnages principaux.
    Rosalinde, jeune femme allemande dont on parle à la troisième personne.
    Mouna, jeune algérienne qui parle à la première personne
    C’est un roman violent où la poésie côtoie le désespoir, d’une plume précise se incisive comme l’est la nature, comme le sont les hommes.
    L’écriture en elle-même retranscrit l’ambiance.
    La longueur, la lenteur, la confusion, la douceur, la répétition, la violence…… sont représentés dans un style compact, cadencé, qui tourne en rond comme l’espoir et le désespoir de tous ces saisonniers.
    Même si la lecture peut parfois sembler longue, difficile, embrouillée, interminable…. je suis impressionnée par la majesté de l’écriture.