La voix impure

L'auteur de ce livre vient d'entreprendre une tâche d'une rare complexité :

- Analyser d'un point de vue sémiologique la phonation : révéler les messages préconscients suggérés par les séquences de voyelles et de consonnes ;

- chercher les contenus mentaux préconceptuels émotifs qu'exprime le "langage musical" ;

- analyser l'information esthétique de l'interprétation vocale ;

- faire la synthèse de ces trois sorties d'information dans leur rapport avec le message verbal : le texte.

C'est une entreprise à haut risque. Le rôle esthétique de la substance sonore des poèmes, admis depuis Denis d'Halicarnasse par la plupart des poètes et par nombreux esthéticiens et linguistes, ne cesse de provoquer de vives critiques. La métaphore du "langage musical", pris très au sérieux par Mozart ou Mendelssohn, est énergiquement rejeté par Stravinsky. A partir de nos expériences quotidiennes, nous sommes enclins d'attribuer un sens à la manière de parler (ou de chanter), mais la "caractériologie vocale" est encore à ses débuts. L'auteur du livre sur "la voix impure" devait donc tâcher de se frayer le chemin - ou plutôt plusieurs chemins qui tantôt courent parallèlement et tantôt s'entrecroisent - en l'absence de sentiers battus. C'était sans doute un sentiment exaltant pour l'écrivain, et c'est ce qui constitue l'intérêt indiscutable du livre pour le lecteur. L'ouvrage de Marie-Pierre Lassus représente une nouvelle tendance heureuse et prometteuse : l'approche pluridisciplinaire de la création artistique, sous ses aspects dramatique, musical et verbal.